Comprendre le monde: Les bons coups marketing de Vachon

24 avril, 2019

Contempler l’histoire de Vachon et de ses p’tits gâteaux, c’est comme regarder l’histoire du marketing moderne, mais en plus sweet. D’une marque modeste de la Beauce d’entre les deux Grandes Guerres, Vachon devient une entreprise d’envergure nationale dans les années ‘70.  Pour nos lecteurs de l’Ontario, Vachon vous a certainement autant sucré le bec qu’à nous, Québécois! Pour que ses produits se retrouvent dans nos dépenses, elle a déployé d’habile façon tout l’arsenal des moyens de commercialisation qui s’offraient à elle pour nous livrer aujourd’hui une grande leçon de branding!

Le bouche-à-oreille (ou le marketing viral et la guérilla marketing pour les milléniaux! )

Durant la Seconde Guerre mondiale, 30% des revenus de Vachon découlaient de ses ventes auprès des soldats de l’armée canadienne. L’entreprise a donc profité de l’occasion pour se faire de la publicité lorsqu’un de ses vendeurs s’est mis à offrir des gâteaux gratuits à un groupe de soldats. Vachon a alors misé sur le bouche-à-oreille de cet événement. Tel qu’espéré, dans les semaines qui ont suivi, Vachon recevait des commandes de l’armée provenant de Vancouver à Halifax et même d’Europe.

Changement d’apparence et visibilité

Dans les années ‘50, l’entreprise a voulu apporter quelques changements à son apparence visuelle. Elle a alors fait appel à un spécialiste, Samuel Fogel, consultant et patron d’une firme de marketing de la région de Montréal.

Pour Vachon, l’emballage devait impérativement respecter quatre critères :

  • Faciliter l’identification des produits Vachon;
  • Être facile à ouvrir et à fermer;
  • Protéger le contenu (pendant la livraison);
  • Conserver la fraîcheur.

Pour changer l’apparence de la marque, Vachon a aussi opté pour des couleurs pastel et douces, à l’avant-garde et très à la mode pour l’époque. Ils ont également décidé d’apporter certaines modifications aux emballages afin de capter l’attention du consommateur et surtout, de leur donner le goût de manger un p’tit gâteau! Les gâteaux May West ne sont certainement pas étrangés à cette stratégie.

La firme a également modifié le logo de l’entreprise dans les années ‘50.

Celui-ci, en forme de diamant jaune et noir depuis ses débuts, a été actualisé radicalement et est devenu V, pour Vachon, coiffé d’une tête de pâtissier.On procédait ainsi à un renforcement de l’identité de la marque. La mention « Sainte-Marie. Co. Beauce », qui dépeint Vachon comme une entreprise régionale a disparu par la même occasion. C’est aussi à ce moment que l’entreprise, qui distribuait ses produits au niveau national, a pris la décision d’ajouter les noms des villes auxquelles ses produits étaient disponibles sur ses camions de livraison, dont Montréal, Toronto, Québec et Halifax. Le nouveau logo était donc visible sur tous les emballages, les caisses de produits ainsi que sur les camions de livraison.

Afin de conserver la jeunesse de la marque tout en respectant son héritage, l’opération a ensuite été répétée à plusieurs reprises.

Publicité à la radio

Le manque de visibilité publicitaire de la marque constituait en soi un point faible pour celle-ci. L’entreprise comptait plutôt sur la qualité de ses produits et surtout sur le bouche-à-oreille pour se faire connaître.

Parfois, l’entreprise passait une annonce dans les journaux où elle se permettait de se procurer un panneau publicitaire, mais rien de plus. En étant peu présente à la radio et à la télévision, elle laissait donc plus de place aux entreprises concurrentes, ce qui constituait un risque en soi pour la marque.

Vachon a aussi eu beaucoup de difficulté à percer à Montréal, mais après plusieurs années difficiles, l’entreprise a réussi à s’implanter tranquillement. C’est en 1954 que le fondateur de la station de radio CJMS à Montréal a proposé à Joseph, un des frères Vachon, de faire de la publicité à la radio pendant le temps des Fêtes. Ainsi, durant les pauses publicitaires nous pouvions y entendre plusieurs annonces sur les petits gâteaux au goût délicieux!

Association à la télé et au cinéma

Jusque-là, la « commandite principale » était réservée aux grands événements, comme le Bye Bye ou une soirée de hockey, et l’intégration publicitaire remontait déjà aux années ‘50 et ’60, notamment avec les pubs de cigarettiers. Ainsi, c’est Vachon qui a remis cette pratique publicitaire au goût du jour en l’appliquant à la dramatique et à la télé « moderne ».

Publicité et visibilité

Expo ‘67

L’Expo ‘67 à Montréal fût une belle opportunité pour Vachon de se faire voir par des milliers de visiteurs provenant de partout. Il n’était pas question pour l’entreprise de passer à côté d’une opportunité comme celle-là. Un kiosque et un camion avec leur logo étaient visibles afin de faire découvrir la compagnie québécoise au reste du monde. On appelle cette pratique de l’« activation de marque » maintenant…

Humour

En 1986, l’entreprise a reconnu que l’humour vend et attire les consommateurs au Québec. Vachon a donc misé sur l’humour dans ses publicités en faisant référence à des situations banales à priori, mais qui finissent par la dégustation d’un gâteau Vachon. Les Jos Louis, Ah Caramel! et Passion Flakie sont les produits vedettes de ces annonces.

Innovation et extensions de marques : Nouvelles recettes

Des nouveaux gâteaux qui fonctionnent bien

En 1932, la compétition est devenue plus féroce et Vachon a voulu se démarquer rapidement de la concurrence, surtout après plusieurs années économiques difficiles. Vachon crée alors LE gâteau qui deviendra l’image de l’entreprise, le Jos Louis. C’est en 1939 que le Jos Louis est officiellement lancé, au même moment où le grand boxeur américain Joe Louis (différence d’une lettre) est au sommet de sa carrière. Vachon a donc profité de la popularité du boxeur pour vendre ses petits gâteaux, mais a réalisé un tour de force en évitant de payer des redevances vu la différence d’une lettre! Un autre bon coup qui n’a pas coûté cher! Soulignons que le gâteau May West s’écrit avec un y et la vedette avec un e… on connaissait l’alphabet chez Vachon.

En 1950, l’entreprise a introduit une nouvelle gamme de produits de tartinades au caramel et de confitures, les produits Diamant Limitée, via l’acquisition de la fameuse compagnie Grenache, pour les plus vieux d’entre nous. Au départ, cette entreprise devait fournir l’usine principale de Vachon, mais rapidement les produits ont été commercialisés et se vendaient à l’externe. D’autres produits ont ensuite été développés dans les années suivantes, tels que le beurre d’arachide, la poudre de cacao, le miel, etc.

Et d’autres, moins bien…

Saviez-vous qu’en 1986, Vachon a décidé de lancer des déclinaisons de ses célèbres petits gâteaux à la crème glacée? Il s’agissait à l’époque d’une belle opportunité pour l’entreprise qui s’attaquait à un marché quasi inexploité au Québec. Les études de marché effectuées pendant l’été ont été concluantes et l’objectif de vente a même réussi à doubler, ce qui a poussé l’entreprise à se lancer dans l’aménagement de nouvelles infrastructures et d’un nouveau local. Vachon a donc fait un lancement officiel des produits en 1987. L’entreprise proposait donc ses produits les plus populaires en format glacé que sont les Milles Feuilles, Ah Caramel!, Puff O Fruit et Jos Louis. Malheureusement, l’aventure du dessert glacé ne fera pas long feu. La distribution réfrigérée n’étant pas la force de Vachon à l’époque…

Le bon citoyen corporatif : santé et gras trans

C’est environ en 1992, avec leur présence accrue dans les médias, que les ventes des petits gâteaux Vachon ont atteint des sommets avec le fort succès de ses nouveaux produits, et nous nommons les Carrés aux Rice Krispies et la gamme des Hop & Go.

Vachon précèdera la tendance qui veut réduire l’utilisation des gras trans dans les produits préparés. Au cours des années 1990, Vachon en profite pour débuter sa fabrication de produits « faibles en gras ». En 1996, Vachon misait déjà sur un Brownie faible en gras, tout en coupant dans le gras de sa célèbre 1/2 Lune et de son proverbial Jos Louis. Une idée payante, du point de vue marketing, car les petits gâteaux se vendaient non seulement au même prix, mais ont le même goût tout en étant meilleurs pour la santé. Le meilleur positionnement pour attirer cette clientèle qui voulait se faire plaisir… tout en surveillant sa ligne!

En bref…

Nous retiendrons de la « riche » histoire de Vachon que tous les moyens étaient bon et pas seulement leurs petits gâteaux. Toujours à l’affût de la plus récente tactique de vente, dont par exemple ses Pastilles de délice, largement inspirées des pastilles de goûts de la SAQ, ils auront utilisé la commandite, le bouche-à-oreille, le développement de nouveaux produits sans oublier les nombreuses mutations de son changement d’identité de marque et de son logo et l’utilisation d’annonces publicitaires. L’entreprise a réussi à conquérir le marché des petits gâteaux, et ce, un Jos Louis à la fois.

Sources :

L’histoire des p’tits gâteaux Vachon 1923-1999, Dave Corriveau

Crédit photos:

Francis Vachon, The Canadian Press Images

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